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24 mars 2009 2 24 /03 /mars /2009 12:36
E-durar e-sanniya
par Karim Zentici

(Partie 2)

Les savants des
durar e-saniya reprochaient à certains ignorants de leur époque de rompre l’allégeance qui les liait à leurs autorités :


Ils avaient conscience, tout comme Sheïkh ibn Bâz, que les autorités n’étaient pas parfaites, mais qu’en même temps, l’anarchie n’apportait rien de bien ; et que pour l’intérêt supérieur des musulmans, il fallait maintenir la société unie autour de son chef suprême. Ce n’est pas que les savants cirent les bottes des émirs, mais ils sont, contrairement aux innovateurs, animés par leur attachement fidèle aux textes scripturaires de l’Islam, qui s’incarnent dans le Coran, la sunna, et le consensus. Il faut donc rester lucide, et ne pas se laisser envahir par les sentiments.[1] Dans une lettre destinée aux ikhwân, Sa’d ibn Hamd ibn ‘Atîq se plaint de certains ignorants imbus de leurs idées. Il faisait remarquer bien avant ibn Bâz, qu’il était intolérable de jeter la suspicion sur les personnes des savants, en les accusant de ne pas remplir leur devoir et de cacher la vérité.[2]

Les savants des durar e-saniya reprochaient à certains ignorants de leur époque de mal utiliser les paroles des imams de la da’wa najdiya :

Sheïkh ‘Abd Allah ibn ‘Abd el ‘Azîz el ‘Anqarî présumait que ces gens-là avaient dû s’inspirer du livre e-dalâil de Sheïkh Sulaïmân ibn ‘Abd Allah âl e-Sheïkh et de sabîl e-najât de Hamd ibn ‘Atîq, déjà… il explique notamment qu’il faut replacer les choses dans leur contexte et que Sheïkh Sulaïmân composa son ouvrage à l’occasion de l’invasion turc du territoire du Najd. Ces armées étaient venues avec de très mauvaises intentions contre la da’wa salafiya, et avaient même une cinquième colonne auprès des bédouins, mais aussi des citadins du coin. Nous pouvons en dire autant pour le deuxième auteur. Il incombe donc pour comprendre les intentions d’un auteur de replacer ses paroles dans leur contexte historique.

La question de la muwâlât notamment est très claire. Il s’agit d’afficher de l’affection aux infidèles pour leur religion et de les aider contre leurs frères pour les mêmes ambitions. Ce qui n’est pas le cas du chef d’État qui est soumis à des accords internationaux avec les nations non-musulmanes. Il en va même de l’intérêt supérieur de la nation. D’ailleurs, ces mêmes Sheïkh – ni d’ailleurs ‘Abd e-Lâtif – n’ont jamais dit qu’on devient apostat sur le simple fait de vivre au milieu d’eux. Cependant, poursuit Sheïkh ‘Abd Allah, ils émettent la condition que le fautif soit considéré aux yeux des païens comme l’un des leurs, sauf s’il le fait dans l’intention de préserver sa vie, non par amour de leur religion. Le simple fait de vivre chez des non-musulmans est un péché certes, mais qui n’atteint pas le degré d’apostasie. Ce même Sheïkh ‘Abd Allah leur reproche ainsi de se fier à leur propre compréhension sans revenir aux savants.[3]

Les savants des durar e-saniya condamnèrent la tentative d’insurrection qui fut menée à leur époque par des ignorants contre le Roi ‘Abd el ‘Azîz:

Une lettre de contestation fut signée par les personnalités suivantes :
-Sa’d ibn Hamd ibn ‘Atîq,
-Sulaïmân ibn Sahmân,
-Sâlih ibn ‘Abd el ‘Azîz,
-‘Abd el ‘Azîz ibn ‘Abd e-Lâtîf,
-‘Omar ibn ‘Abd e-Lâtîf,
-‘Abd e-Rahmân ibn ‘Abd e-Lâtîf,
-et Mohammed ibn Ibrahim.

Ils leur reprochaient d’avoir menacé le Roi par courrier, sous le couvert de la morale, en s’éloignant ainsi de la voie des anciens. Ils se sont purement et simplement désolidarisés de ces derniers, comme ibn bâz a pu le faire avec certains symboles contemporains. Ils ne furent motivés en cela, ni par la crainte de personne ni par l’appât du gain, contrairement aux idées reçues… La seule chose où on peut leur en vouloir, c’est d’être des salafis et de se conformer scrupuleusement et rigoureusement à la tradition prophétique. Ils ont au moins le mérite d’être en harmonie avec leurs idées. Ils condamnaient ainsi toute forme d’insurrection, même s’ils étaient partisans du bon conseil prodigué dans les normes.[4]

Les savants des durar e-saniya se sont désolidarisés des kharjites de leur époque :

Dans cette même lettre, ils s’adressent aux mutins qui prétendent être dictés par la voie de leurs Sheïkh. Le problème, c’est que les savants de Najd ne connaissaient pas ses fameux Sheïkh, à tel point qu’ils doutaient de leur origine et de leurs intentions. En tout cas, les imams de la da’wa ne se cachent certainement pas derrière ce zèle effréné qui trahit que ces mutins sont plus guidés par leurs passions que par ces Sheïkh en question. Ils ne concertaient jamais les savants sur leurs projets et confectionnaient leurs propres fatwas entre eux (tient, tiens, nous avons déjà vu cela quelque part !).

Innocents de leurs agissements, les signataires de la lettre accusatrice suggèrent à ces mutins de se remettre en question et de se repentir devant le Seigneur, ce qui nous faisons également en prodiguant le pieux et le modeste conseil à nos « amis » de Belgique, mais aussi de France et de Navarre d’abandonner ce chemin périlleux pour les deux mondes, dans lequel ils se sont aventurés !

Les signataires n’omettent pas de rappeler solennellement qu’ils appellent à l’union autour de l’Imam du pays, et que toute opinion qu’on leur impute allant dans un autre sens n’est qu’une vulgaire calomnie ![5]


Les savants des durar e-saniya condamnaient de prendre à la légère les questions du takfîr, qui, complexes, sont réservées aux savants :

Commençons par Abâ Battîn qui représente un symbole aux yeux des takfiris contemporains. Ce dernier recommande de :
-ne pas s’initier dans les questions du takfîr sans avoir les outils en main pour le faire.
-De ne pas sortir ou de faire entrer quelqu’un dans l’Islam selon ses propres appréciations, car c’est un domaine où seuls les textes font autorités.
-D’éviter, et ce point est d’une extrême importance, de se prononcer sur des questions où la divergence règne entre les savants. c’est un domaine où il faut être prudent, sauf s’il existe un texte explicite sur la question.

Malheureusement, selon Abâ Battîn, Satan est parvenu à faire glisser bon nombre de gens dans ce domaine, qui est des plus délicats. Entre faire du takfîr à outrance et interdire le takfîr à outrance il a l’embarras du choix. Le plus étonnant, pour reprendre les termes d’Abâ Battîn, c’est que si on interrogeait les uns et les autres sur une simple question qui touche aux ablutions, ils seraient incapables de répondre, et, paniqués, ils s’appuieraient aussitôt sur les savants. En revanche, quant il s’agit des questions aussi graves que le takfîr, ils font étrangement preuve d’assurance et d’autonomie.[6]

Ibn Sahmân, quant à lui, approuve le Sheïkh Abâ Battîn. [7] En outre, en réponse à une lettre, il constate notamment, que la plupart des religieux qui s’initient dans ce domaine, sont de simples gens n’ayant pas le moindre semblant de science ni la moindre expérience pouvant les épargner du péril. Souvent, ils n’ont jamais feuilleté les analyses des grandes références sur la question qui n’omettent pas de rappeler dans leur discours, que seuls les grands érudits sont à même de s’y engager.[8]

À suivre…

Par : Karim Zentici

[1] Voir : E-durar e-saniya (7/282) pour la 2ème édition et (9/104) pour la 5ème édition.

[2] Voir : E-durar e-saniya (7/302) pour la 2ème édition et (9/139) pour la 5ème édition.

[3] Voir : E-durar e-saniya (7/309) pour la 2ème édition et (9/157) pour la 5ème édition.

[4] Voir : e-durar e-saniya (7/321) pour la 2ème édition et (9/183) pour la 5ème édition.

[5] Idem.

[6] Ibn Sahmân cite ce passage dans manhâj el haqq wa el ittibâ’ (p. 77), mais il se trouve également dans… e-durar e-saniya (10/374-375).

[7] Voir : manhâj el haqq wa el ittibâ’ (p. 80).

[8] Voir : e-durar e-saniya (10/374-375).

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